Selon Brent Walston:
Créer une Forêt en Bonsaï
par Brent Walston
Traduit de l'Anglais par Jean-Christophe Godart
IntroductionDu point de vue du débutant, c'est un excellent style pour le début, si pas le premier, parce que les sujets utilisés sont bon marché, et habituellement facilement disponibles. En hiver, des plantes de semis à racines nues pour des plantations en forêt peuvent être achetées par lots pour à peu près 35 à 50 Euro cents pièce. Ces arbres sont habituellement vendus en lots de 50 ou 100. On peut partager une commande avec des amis ou des membres d'un club et obtenir assez de sujets pour plusieurs plantations en groupe et aussi des arbres solitaires.
La plupart de ces arbres à racines nues ont poussé en pleine terre et vont nécessiter la taille de la racine pivot et une année de culture avant d'être utilisés en bonsaï. J'ai décrit ce processus dans l'article sur la taille des plantes de semis à racines nues.
Disposition des ArbresJe passe beaucoup de temps à réfléchir à la disposition des arbres pour en obtenir une qui paraisse la plus naturelle possible, et j'ai élaboré quelques lignes de conduite qui, je pense, fonctionnent. Premièrement, il est utile d'avoir un concept de triangle scalène tellement utilisé en bonsaï. C'est un triangle qui délimite souvent les contours du feuillage. Le triangle est composé de trois côtés de longueurs différentes sans aucun angle droit (90 °). Cela fait un triangle qui, quand il est vu de l'avant ou de la perspective principale, aura trois niveaux définis par les coins. Les points du triangle peuvent représenter la position des éléments, que ce soit des arbres d'une forêt, les trois niveaux du feuillage, ou la position de pierres dans un jardin.
Ce groupe de trois peut aussi être vu comme un groupe de deux et un. Un groupe de cinq peut être considéré comme un groupe de trois et deux, ou deux groupes de deux et un groupe de un. Visualiser la disposition en groupes de trois, ou deux et un permet de trouver des positions agréables pour tous les arbres.
Une autre ligne de conduite que j'utilise est de ne jamais placer un arbre sur la ligne centrale (vers l'avant) ou la ligne médiane (qui sépare l'avant de l'arrière) du pot. Des arbres placés à ces endroits vont créer une symétrie parfaite qui convient moins bien qu'un équilibre dynamique. Je vois cela comme donner un aspect visuel mystérieux à l'espace. Nos yeux détectent très facilement des intervalles réguliers, en particulier les moitiés et les quarts. Nous pouvons en réalité le faire avec un haut degré de précision. Je pense que ce que nous faisons inconsciemment est de rejeter ces intervalles quand nous les détectons. Des espaces qui ne rentrent pas dans des intervalles facilement identifiables nous attirent plus et sont 'mobiles' quand notre cerveau essaye de déterminer l'intervalle.
Des arbres ne devraient pas être directement l'un derrière l'autre quand on les regarde de l'avant, et trois arbres ou plus ne devraient pas être alignés. Il peuvent être disposés proches l'un de l'autre au milieu du pot avec un vide assez grand en périphérie donnant l'impression d'un tertre, d'un monticule au haut d'une colline, ou être répartis dans le pot pour donner plus l'apparence d'une forêt.
Créer une PerspectiveLes arbres en lisière du groupe peuvent être légèrement inclinés vers l'extérieur pour créer des effets de perspective. C'est presque une vue photographique en 'oeil de poisson' (fish eye) et tend à accentuer et enrichir l'aspect compact de la forêt. Cela permet aussi à la lumière de pénétrer au centre. Cela peut être très subtile ou exagéré, chacun donnant un aspect très différent.
Si les plus grands arbres sont disposés à l'avant et les plus petits à l'arrière, cela créera aussi une perspective, avec la vue qui s'éloigne quand l'oeil s'avance dans la forêt.
Les arbres numéro un, deux, et trois sont très importants et doivent être disposés avec soin. Ils devraient diminuer en hauteur et diamètre du tronc, et être positionnés en un groupe de trois. C'est plus facile si les arbres numéro deux et trois sont placés à gauche et à droite de l'arbre numéro un. Les arbres restants devraient être plus petits, mais en réservant les plus minces pour l'arrière.
Attacher les ArbresAttacher les arbres au pot peut être un défit. En général, il doit y avoir un moyen de maintenir les arbres en place jusqu'à ce que les racines se soudent en un tout. Du point de vue de la disposition des arbres, les fixer facilite grandement le travail. Pour les plus grands arbres, la disposition générale devrait être décidée avant que les arbres n'aillent en pot et on peut prévoir de fixer un fil au fond du pot avec de la colle époxy. Une boucle de fil peut maintenir un pain de racines, ou passer autour des troncs de deux arbres ce qui va également les maintenir en place. Pour de plus petits pots, je fixe avec du fil un grand morceau de grillage en plastique qui couvre l'ensemble du fond et pas uniquement les trous de drainage. Avant de le fixer, j'essaye de décider où vont être placés les arbres et je fais passer une boucle de fil par les trous de drainage pour attacher les troncs de deux arbres avec un morceau de fil.
Envisager les PossibilitésJe trouve que les groupes de trois sont un réel défi, pour moi il est plus facile de travailler avec plus d'arbres. Même pour des petits pots de 15 cm (6 pouces), je préfère travailler avec sept arbres.
J'ai vu de très beaux groupes composés d'un nombre massif d'arbres sans arbres principaux clairement définis, mais je préfère la première approche. C'est tout bonnement une question de goût.
Disposer des arbres en groupes comme ci-dessus devrait créer des espaces inégaux entre les arbres pour que 'les oiseaux puissent voler au travers' et souvent un espace, un abri ou une clairière près du centre du pot près de l'arbre numéro un. C'est un lieu de repos pour l'oeil. Je positionne les branches pour inviter l'oeil à cet endroit.
Influence de l'EspèceDifférentes espèces peuvent créer des plantations en groupes d'aspect très différents. Par exemple, j'ai comparé ici l'érable trident, Acer buergerianum à l'orme de Chine à écorce liégeuse, Ulmus parvifolia 'Corticosa'. L'exemple peut être appliqué pour la plupart des érables et ormes de Chines.
Les érables trident, quand ils sont plantés en bosquets, ont un port droit, élancé qui est très agréable. Ils vont réellement vous donner la sensation d'une forêt naturelle de mono culture typique des régions tempérées. Obtenir des espaces sous le feuillage sera très facile car, quand on les taille, ils ont tendance à bourgeonner juste sous la coupe.
L'orme de Chine à écorce liégeuse est plus joli, et a une prédisposition naturelle de former une couronne arrondie. En forme de bosquet, je les espacerais plus afin que le caractère de chaque arbre puisse se développer. Cet aspect est typique des forêts aérées de chênes en Californie. Le dôme de chaque arbre dans ces bosquets naturels est habituellement clairement visible, même s'ils sont groupés. Le feuillage vert foncé de ces chênes contrastant avec l'herbe sèche dorée en fin d'été est une de mes vues préférée au monde, et j'espère un jour en créer une représentation en bonsaï.
Les ormes traités de cette manière demandent des troncs plus gros et plus courts que les érables tridents, et plus d'espace entre les arbres pour permettre de distinguer les cimes arrondies. Il me semble que cela conviendrait pour un grand plateau.
En ConclusionLe contour du feuillage en triangle scalène est créé par l'ensemble du feuillage de tous les arbres au lieu des branches principales et de la cime d'un bonsaï solitaire. Le point le plus haut est, bien sûr, créé par l'arbre numéro un, et les deux autres par les arbres à l'extrême gauche et droite. Pour moi, il n'est pas trop important d'avoir le coin gauche plus bas que celui de droite ou vice versa dans une plantation en groupe. Beaucoup de contours à dôme aplati sont aussi parfaitement acceptables. Ma vue favorite des forêts est sans les feuilles de toute façon. Le branchage compliqué de tous ces arbres dans un petit pot est un vrai régal pour moi.
Selon Keizo Andô:
Il faut imaginer une forêt dans la nature.
C’est la partie gauche du cerveau qui travaille, il faut pouvoir aiguiser son regard, son esprit
Agencement :Le plus important, c'est le placement des arbres, il faut avoir ce sens du placement.
On n’utilise qu’une seule espèce.
La profondeur du paysage a énormément d’importance.
Pour cette réalisation, il faudra avoir des troncs de hauteurs et de diamètres différents, ça permettra d’augmenter la perspective.
Le premier tronc est le plus gros et le plus haut, il se place à l’avant et les autres, plus petits et plus fins, en arrière fond.
Ne jamais aligner les arbres.
Tous doivent rester visibles.
Le premier groupe, le principal, contient le Père, le second est plus petit et placé en arrière de premier.
On place deux ou trois très petits arbres à la fin du premier groupe, un peu comme pour faire une liaison avec le groupe secondaire
Toujours un nombre impair, on garde un nombre impair par groupe quand on travaille plusieurs groupes même si le total des arbres constituant la forêt donne un nombre pair.
Les arbres qui ont du mouvement compliquent la réalisation.
Si la direction de la forêt va vers la droite, on place le premier groupe à gauche et on laisse un espace vide sur la droite.
On coupe toutes les branches qui ne vont pas dans le sens de la forêt ainsi que celles qui touchent les autres arbres (on coupe ou on raccourcit).
Le pot : ovale ou rectangulaire, le rond est plus difficile tout comme le carré
Une forêt avec des conifères aura un aspect masculin donc il faudra un pot brut.
Toutefois, les forêts de conifères sont placées dans la catégorie Gyo, elles peuvent donc recevoir également un pot émallé de couleur adaptée à ce style.
Avec des feuillus, elle aura un aspect féminin, on utilisera un pot émaillé de couleur.
Mochicomi :Pour une première mise en place, on utilisera un pot de culture, une caisse, …
Il faut fixer les arbres solidement.
On profite du mochicomi (travail de tous les jours) pour observer la forêt et réévaluer le placement des arbres.
On rempote chaque année, on en profite pour revoir la place de chaque arbre, un arbre qui ne grossit pas, qui ne se développe pas n’est pas à sa place.
On profite de chaque rempotage pour couper la racine pivot et diminuer l’épaisseur du pain racinaire de cette façon, on arrivera à mettre la forêt dans un pot très plat.
On en profite également pour rajouter des arbres et éliminer les arbres morts.
On peut faire un seul groupe d’arbres ou plusieurs.
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Une petite subtilité méconnue de la plupart des bonsaïka en Europe.
Si on veut accentuer le caractère masculin de la forêt de conifère on dirigera la forêt vers la gauche.
Si on veut donner un caractère encore plus féminin à la forêt de feuillus, on la dirigera vers la droite.
Quelques photos.
Sujet: Yosé-ué, Forêt. 
Mar 19 Mar 2024 - 19:45
